Le réemploi chez Lökki, c’est pour quand ? #consigne

éthique - - 17/06/2024

La consigne (ou encore « réemploi ») revient en force depuis quelques années en France. Il se passe rarement un jour sans que l’on nous pose la question « et vous, quand est-ce que vous vous y mettez ? »

À cette question, nous répondons : « on y travaille, et c’est plus compliqué qu’il n’y paraît. »

Eh oui, on pense souvent à l’époque de nos grands-parents qui restituaient leur bouteille de lait en magasin contre quelques pièces. On pense aussi souvent au système allemand où l’on a juste à glisser nos bouteilles dans une machine contre un bon d’achat. Mais pour nous, ça n’a pas été si simple ces derniers mois, on vous explique pourquoi tout de suite :

Des contraintes d’emballage

La première chose à savoir : aujourd’hui, on a tendance à privilégier le réemploi sur les grandes bouteilles. Nous étudions donc le déploiement de la consigne sur nos bouteilles 1 litre uniquement. C’est dû au fait que les quelques centres de lavage qui existent en France sont équipés pour ne laver que de grandes bouteilles. Mais attention, il n’est pas question d’utiliser nos bouteilles en verre actuelles pour les réemployer, car elles ne sont pas prévues pour cela et il y aurait un risque important d’accident pour le consommateur que nous ne préférons pas prendre. La bouteille risquerait de casser ou d’exploser, car trop fragilisée par les cycles de réutilisation.

Pour qu’une bouteille soit certifiée apte au réemploi, il faut 2 choses :

  • Elle doit être plus solide qu’une bouteille à usage unique. En effet, elle doit être capable de supporter plusieurs cycles de remplissage-manipulation-transports multiples-stockage-lavage. Les bouteilles aptes au réemploi sont donc plus lourdes, et donc beaucoup plus chères.
  • Son étiquette doit être lavable : en centre de lavage, les bouteilles sont plongées dans un bain de soude. C’est comme ça que l’on en retire les étiquettes. Pour que les étiquettes se décollent parfaitement, elles doivent respecter un cahier des charges défini par le réseau France Consigne. Le papier, le format et les techniques d’impression doivent être calibrées pour optimiser au maximum les chances de réemploi. C’est la découverte de beaucoup de nouvelles contraintes pour nos emballages !

A ce stade, vous êtes peut-être déjà en train de vous dire que ce sont des contraintes non négligeables. Mais à ces contraintes qui s’appliquent à tous les types de produits (du jus de fruits à la compote en passant par le vin), s’ajoutent des contraintes spécifiques à nos produits. Ce n’était déjà pas assez compliqué comme ça 😉

Des contraintes spécifiques au kombucha et au kéfir de fruits

Chez Lökki, on ne pasteurise pas nos kombuchas ni nos kéfirs de fruits. Ce sont donc des boissons vivantes, c’est-à-dire qu’elles contiennent des micro-organismes vivants qui continuent leur travail de fermentation dès lors que la bouteille n’est pas stockée au frais. Et qui dit fermentation, dit bulles, et qui dit bulles dit… pression ! Vous l’aurez compris, nous attendons de notre bouteille qu’elle résiste à la pression du gaz qu’elle contient. Sinon, elle pourrait exploser. Boum.

Donc si on met tout bout à bout, il nous faut :

  • Une bouteille apte au réemploi (certifiée par le verrier par la mention « réemployable » ou « reusable » sur le plan verrier)
  • Une bouteille qui sache tenir une pression importante
  • … et tout simplement, une bouteille en format 1 litre car c’est notre format habituel

Problème : il n’y a qu’une seule bouteille sur le marché qui remplisse tous ces critères. Pourquoi c’est un problème, nous direz-vous ? Eh bien, elle a le désavantage d’être trop haute (plus de 30 cm…) et elle ne rentre donc pas dans les frigos de la majorité de nos clients. Ça a l’air tout bête dit comme ça, mais un détail de ce type peut tout faire basculer !

Nous pourrions nous tourner vers une bouteille apte au réemploi et apte à tenir la pression plus petite, en format 75 cl, car cette bouteille existe (vous l’avez peut-être déjà croisée dans les frigos de votre Biocoop préférée). Mais dans une telle période inflationniste, nous n’avons pas à cœur de donner à nos consommateurs moins de produit pour un prix équivalent. Nous préférons rester sur le format litre pour que le consommateur s’y retrouve au mieux en termes de rapport qualité/prix.

Des discours un peu contradictoires… qui brouillent le message

Comme si tout cela n’était pas assez compliqué, nous voyons quelques confrères se lancer dans la consigne… mais pas toujours de la meilleure des manières :

  • Avec une bouteille apte au réemploi, mais qui ne tient pas la pression
  • Avec une bouteille qui n’est pas apte au réemploi

Dans les 2 cas, le risque est le même : la bouteille peut exploser, que ce soit sous la pression du kombucha/kéfir ou que ce soit parce que la bouteille a subi beaucoup de chocs au cours de ses divers cycles d’utilisation alors qu’elle n’est pas faite pour. Chez Lökki, nous ne souhaitons pas prendre ce risque.

Un réseau où tous les acteurs sont en train de se coordonner

En France, il y a quatre acteurs majeurs dans le cycle de la consigne :

  • Les transformateurs : comme nous, ce sont les entreprises qui mettent des produits sur le marché
  • Les points de collecte : il s’agit de magasins et autres points de vente se portant volontaires pour accueillir des casiers ou pallox de stockage pour que le consommateur y ramène ses bouteilles vides.

  • Les associations comme l’Incassable, La Consigne de Provence, Rebooteille, Consign’Up, La Consigne Bordelaise… Elles font le lien entre transformateurs, points de collecte et centres de lavage. Leur première mission est d’accompagner les transformateurs dans le choix d’un couple étiquette/emballage apte au réemploi. Ce sont elles qui vont rencontrer des magasins pour les encourager à faire un peu de place pour des casiers et ainsi devenir des points de collecte. Car plus il y aura de points de collecte, plus ce sera facile de massifier le gisement d’emballages réemployables. Et enfin, ce sont elles qui gèrent la logistique : faire des tournées de ramasse parmi les points de collecte pour emmener les bouteilles au centre de lavage. Ces assos sont regroupées sous un seul porte-étendard : le réseau France Consigne.

  • Les centres de lavage : ils s’occupent de trier les bouteilles reçues (car beaucoup de consommateurs mettent tout et n’importe quoi dans les casiers de consigne, même des bouteilles non-consignées), décoller les étiquettes, laver les bouteilles, s’assurer de la qualité du lavage pour ne pas mettre en danger la sécurité du consommateur, et les re-palettiser pour pouvoir les remettre à la vente auprès des transformateurs.

Et bien sûr, il y a vous, les consommateurs qui rapportez vos emballages vides en magasin 😉 ça fait beaucoup de monde ! Un peu compliqué d’établir une communication entre tous ces maillons de la chaîne, mais c’est ce qui arrive lorsque l’on ne peut ni stocker ses bouteilles en interne dans ses propres locaux, ni laver ses bouteilles soi-même. Cela nécessite de la place et beaucoup d’investissements si l’on veut faire les choses bien (c’est-à-dire avoir des bouteilles impeccables d’un point de vue microbiologique). Seuls les gros mastodontes peuvent se permettre une telle organisation et une telle logistique.

Mais dans tout ça, où en est réellement Lökki ?

Voilà plusieurs années qu’on étudie de près le monde du réemploi et qu’on échange avec des acteurs comme l’Incassable, les verriers, les imprimeurs, pour démêler toutes les informations et se projeter sur comment se lancer. Nous avons même été aidés d’un groupe d’élèves ingénieurs pour cela ! Pour ce qui est des actus récentes, début 2024 nous avons décroché une subvention de Citéo suite à l’appel d’offre « encore plus de réemploi » ; Notre souhait est d’utiliser cette subvention pour lancer une phase test à petite échelle de consigne pour mieux l’étudier et pouvoir la déployer à plus large échelle. Cette subvention nous est très précieuse car une bouteille apte au réemploi coûte au moins 2 fois plus cher qu’une bouteille à usage unique ! Impossible de répercuter ce coût sur nos clients. Pour autant, endosser ce coût à 100% serait financièrement impossible pour Lökki.

Nos actions du moment sont les suivantes :

  • Trouver une bouteille en format 1 litre, apte au réemploi, qui sache tenir la pression, et qui rentre dans les frigos de nos clients : Citéo est en train de développer une bouteille qui pourrait remplir tous ces critères mais elle n’est pas attendue avant début 2025. Nous faisons partie du groupe de travail qui développe cette bouteille afin de donner notre avis dessus.
  • Retravailler totalement nos étiquettes pour répondre aux nouvelles contraintes, et donc les rendre apte au réemploi.
  • Faire passer des tests à nos nouvelles étiquettes pour s’assurer de leur pérennité en milieu humide (on ne veut pas d’étiquette qui se décolle au bout de 3 mois en frigo !), mais aussi de leur décollage optimal en centre de lavage.

Bref on avance doucement mais sûrement. Notre souhait est avant tout d’assurer la sécurité du consommateur, mais aussi de faire les choses bien et de manière pérenne. Si les dieux du réemploi sont avec nous, nous devrions pouvoir lancer cela en 2025 😉

Pour finir, il faut garder en tête que pour relancer la consigne il faut que de nombreux acteurs s’y mettent, car tout repose sur une dynamique de volumes. Quand on démarre avec le réemploi, il peut se passer un long moment avant de voir revenir ses bouteilles. Il faut le temps que le consommateur comprenne que la bouteille est réemployable, qu’il la ramène en point de collecte, que la bouteille soit lavée après un temps de stockage plus ou moins long. Et il faut que le centre de lavage ait assez de bouteilles identiques pour former une palette entière (plus de 1000 bouteilles à collecter !) avant de nous la revendre.

Donc encore une fois, tout commence par l’engagement du consommateur, cruciaux pour que l’on ait un taux de retour élevé et une boucle pérenne. Avec une bouteille apte au réemploi (bien plus lourde que son homologue à usage unique), il faudrait un minimum de 20 cycles de réutilisation avant d’être recyclée pour qu’elle ait une meilleure performance environnementale qu’une bouteille à usage unique. Vous reconnaîtrez le caractère réemployable d’une bouteille grâce au pictogramme « Rapportez-moi pour réemploi ».

Et vous, combien de bouteilles avez-vous déjà ramené en magasin ?

 

Quand on aime, on partage !
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